Avoir une conviction sur le Parler en Langues, est-ce suffisant?

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Quelle que soit votre position, vous allez lire cet article en vous demandant de quel côté ça va encore tomber… Mon but n’est pas de soutenir ou de réfuter la validité du don de parler en langues angéliques (d'autres le font mieux que moi quel que soit leur avis). Je vais prendre un autre angle. Comme pour tous les sujets clivants dans le cadre de la théologie évangélique, l’enjeu n’est pas seulement le sujet, mais aussi la manière dont nous défendons notre position. Quelle qu’elle soit.

À titre personnel, aborder le sujet “des langues” ne me pose aucun problème et si ma position est connue, cela ne me gêne pas. (Je suis « non charismatique » — le terme est bien malheureux— mais, mon avis personnel on s’en moque!) J’aime mes frères et sœurs « charismatiques » et j’ai régulièrement la joie de collaborer avec eux.

Un sujet théologique secondaire…

La majorité des auteurs que je connais s’accorde pour dire qu’un éventuel don de parler en langue des anges est secondaire dans la théologie évangélique. Du moment que l’on n’en fait pas un signe distinctif de la régénération… Bien entendu.

Aux conséquences pastorales malheureuses…

Cependant, nous ne pouvons pas ignorer (du moins dans notre contexte occidental) les nombreuses conséquences pastorales que le sujet soulève.
Le siècle dernier a vu beaucoup d’amitiés déchirées, sans parler du nombre d’Églises, à cause de ce sujet.
Il n’y a qu’à voir la façon dont le sujet agite toujours les chrétiens sur les réseaux sociaux pour se rendre compte qu’il est toujours controversé.

2 expériences personnelles qui illustrent notre problème:

La première fut lors d’un voyage, alors que j’étais tout jeune chrétien.
Alors que je n’avais pas trop d’avis sur le sujet, des amis charismatiques m’ont intimé de les laisser m’imposer les mains pour que je reçoive le parler en langues afin “de découvrir enfin la puissance de la prière” et “d’arrêter de faire du sur-place dans ma vie spirituelle”. Leur insistante fut tellement lourde, que j’ai accepté.
C’était non seulement troublant, mais cela m’a aussi jeté dans un grand désarroi: Me manquait-il un don pour être en communion avec Dieu? Finalement, pourquoi Dieu ne me l’accordait-il pas? Pourquoi n’étais-je pas comme eux? Il m’a fallu quelques jours pour découvrir à nouveau l’assurance de mon salut et la suffisance de Christ pour moi.

La deuxième s’est passée quelques années plus tard.
Lors d’un congrès, une sœur est venue me voir en demandant à me parler. Ce qu’elle m’a dit m’a mis KO debout. Elle m’a remémoré sa présence lors d’un débat que j’avais eu avec des amis sur le sujet, plus d’un an auparavant.
Avec courage, elle m’a témoigné de la façon dont elle avait été blessée par mes remarques lors de cette joute.
Bien que neutre, elle était restée triste par mes propos méprisants à l’encontre de mes frères et sœurs charismatiques. Avais-je raison? Ce n’était pas son problème. Ce qui l’avait choquée, c’était ma suffisance.
Personnellement, je me souviens à peine de ce débat, alors que ma sœur se remémorait parfaitement mon manque d’amour et mon orgueil.
KO, car je savais qu’elle avait raison. Mon vrai problème dans un débat, c’est mon orgueil.

Le seul remède

Mes amis et moi-même faisions la même erreur que l’Église de Corinthe. Le travers de l’orgueil était un de ses péchés majeurs: “Puisque j’ai raison, je suis, moi, plus spirituel et intelligent que toi… Et puisque je suis plus spirituel et plus intelligent que toi, je te suis supérieur. Et puisque je te suis supérieur, je peux te mépriser, ce n’est pas trop grave.

2000 ans plus tard, nous vivons dans une culture du moi, où les capacités ont beaucoup de place. Pas étonnant que nous fassions des dons un sujet central.
L’ironie à propos du parler en langues? Nous en faisons le sujet central de 1 Corinthiens 12–14, alors que Paul l’utilise justement pour illustrer ce que les Corinthiens avaient totalement mis de côté… mais qui est le plus important pour lui.

Ainsi, quelle que soit votre interprétation, je vous partage ma conviction: vous devez chercher à appliquer 1 Co 13 lors de votre défense doctrinale.
Ce qui donnera:

“Quand j’exprimerais parfaitement ma doctrine sur le parler en langues, si je n’ai pas l’amour, je suis du bronze qui résonne ou une cymbale qui retentit.
Et quand j’aurais été sûr de mon expérience, possédant toute la connaissance sur le sujet, quand j’aurais même convaincu un maximum de personnes que j’ai raison, si je n’ai pas l’amour, je ne suis rien…”

Alors, KO ?

Mon bilan personnel: ma conviction n’est pas suffisante

Je ne dis pas que nous ne devons pas avoir d’avis. J’ai le mien, et j’espère savoir le défendre avec honnêteté intellectuelle… mais pas sans amour!
Je ne dis pas non plus qu’il ne doit pas y avoir de débat. Comment pourrait-on faire accepter ça à un Français! Au contraire, je pense qu’ils sont, dans une certaine mesure, sains, du moment qu’on respecte certaines règles (j’y reviens à la fin de ce post).

Mais j’ai compris que si l’autre doute de mon amour pour ceux qui ne croient pas comme moi, j’ai ipso facto tort. Selon Paul, je me disqualifie. Plus grave, je fais du mal à l’Église du Seigneur.

Il me semble inévitable de ne pas avoir une confession de foi qui aborde clairement le sujet. Je défends celle de mon Église, car j’en suis convaincu.
Mais ce n’est pas suffisant, il faut aussi que j’aie une pastorale biblique dans la façon de traiter le sujet.

Les 2 conseils d’un jeune responsable qui espère ne jamais voir son Église se diviser

Afin de ne pas reproduire le péché des Corinthiens dans leurs débats internes sur ce sujet, quelle que soit votre position et celle de votre Église :

  1. La position de votre Église locale ne doit pas être méprisée, mais respectée. Votre Église est plus importante que votre personne. Si son cadre vous empêche vraiment de vivre votre foi, le plus sage est probablement de vous joindre à une nouvelle communauté, dans la paix avec tous, et sans chercher à entraîner les autres avec vous.
  2. Quel que soit l’avis d’un frère ou d’une sœur sur ce sujet, il ne doit jamais croire qu’il est méprisé. Mieux! il ne doit jamais douter que vous l’aimez. Si cette attitude est réciproque, nous pouvons conclure que nous sommes d’accord d’être en désaccord sur le sujet, nous encourageons à appliquer le point précédent puis passons à autre chose.
    Nous avons mieux à faire pour honorer Dieu et le faire connaître.

Le mot de la fin à Paul:

Ne faites rien par esprit de parti ou par vaine gloire, mais que l’humilité vous fasse regarder les autres comme étant au-dessus de vous-mêmes. (Ph 2.3)

Raphaël Charrier

À 17 ans, Raphaël s’engage dans l’armée dont il est renvoyé moins de deux ans après. Il reprend alors l’école et obtient le bac à 23 ans. C’est à ce moment qu’il découvre la personne et l’œuvre de Jésus-Christ et place sa foi en lui pour être sauvé. Il poursuit ses études et devient Éducateur Spécialisé. Il s’oriente ensuite vers des études de théologie à l’Institut Biblique de Genève, puis à la Faculté Libre de Théologie Évangélique de Vaux-Sur-Seine, afin de se consacrer au service de l’Évangile.

Raphaël a été pasteur de l'Église Chrétienne Évangélique de Grenoble pendant 9 ans. Il sert désormais l'Église comme enseignant. Il est marié à Marion et ils ont deux enfants. Il est auteur du livre Vivre pour Jésus, qui a pour objectif d'aider les chrétiens à poser les bons fondements de la vie chrétienne, et coauteur de L'Évangile.net: 7 signes, une ressource d'évangélisation basée sur l'Évangile selon Jean.

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Orateurs

D. Angers